« Un parc de logements durablement abordables représentant 10 à 15 % de l’ensemble, contre 3 à 4 % aujourd’hui » : le ministre Henri Kox défend une réforme profonde des aides publiques en la matière. La Chambre Immobilière donne son point de vue…

En présentant devant le Parlement son projet de réforme, le ministre Henri Cox a admis que le Grand-Duché était un mauvais élève européen en termes de logement social et/ou abordable. Ces appartements ou maisons ne constituent que 3 à 4 % du parc dans le pays, alors que la proportion est de 10 à 15 % en Allemagne et en France, et même 30 % aux Pays-Bas.

Tandis que le marché immobilier demeure tendu (avec une offre bien inférieure à la demande, d’où une hausse des prix moyenne annuelle à deux chiffres excluant toujours davantage les plus modestes), il était donc temps, pour le gouvernement, de revoir une législation datant de 1979 !

Deux réformes en une

Pointant au passage une faille du dispositif (la revente sur le marché privé de biens construits grâce à des aides de l’État), le ministre a expliqué vouloir jouer sur deux tableaux.

Le premier concerne la construction : dès son entrée en matière, le ton est donné – les sociétés commerciales ou le secteur privé pourvoyeur de plus de 95% des projets neufs ne seront pas intégrés dans les réflexions du Ministère, carrément exclus du système. 

Ne seront éligibles aux subventions que des opérateurs ayant constitué une SIS, c’est-à-dire « une société d’impact sociétal » à 100% d’actions d’impact. Bien évidemment, les acteurs historiques du logement social (Fonds du logement, Société nationale des habitations à bon marché, communes, fondations…) continueront à bénéficier du soutien de l’État. Pour Jean-Paul Scheuren, Président de la Chambre Immobilière, cette approche se calque plus sur une position idéologique que pratique. « Il est évident que nous exprimons nos plus vives critiques à cette exclusion expresse des sociétés privées (commerciales) des aides à la pierre. Nous demandons une ouverture de ce secteur depuis 30 ans ! »

Or, depuis 50 ans, le logement subventionné (aides à la pierre) est du domaine exclusif de l’Etat et des communes. « Le résultat est probant : 30 000 logements locatifs abordables manquent aujourd’hui au Luxembourg. Seule une action concertée de tous les acteurs peut réussir à résoudre ce problème ». Le secteur privé a des propositions concrètes et n’attend qu’un message du Gouvernement pour apporter sa contribution. Pour la Chambre Immobilière, il est clair que « sans les sociétés privées, nous n’arriverons pas à attaquer le problème de fonds. Les sociétés privées sont parfaitement capables de créer des logements aux mêmes conditions que les promoteurs publics ».

Évidemment, ce secteur du marché doit rester encadré par l’administration publique et les règles doivent être clairement définies, « mais l’obstination du Ministère du Logement est incompréhensible ».

Objectif : 50 % de résidents éligibles

Le second volet concerne les aides aux ménages. L’objectif est délibérément ambitieux : « Jusqu’à 50 % de la population résidente doit devenir éligible à l’accès à un logement locatif abordable, construit et géré par la main publique », plaide le ministre. Pour autant, avant d’en arriver-là, est envisagée une série de coups de pouce aux particuliers cherchant à louer un bien dans le privé (augmentation des montants et du nombre de foyers éligibles à la garantie locative et aux subventions aux loyers) ou à acheter dans le privé (élargissement des modes d’octroi de la garantie d’emprunt et des primes diverses accompagnant les acquéreurs).

La Chambre immobilière valide le projet de l’aide au loyer sur le principe de pallier un problème d’urgence. Néanmoins, « nous donnons à considérer que pour la part de la population visée, soit 50% du marché de la location, cette aide à la demande risque d’entraîner une augmentation des loyers du marché de manière générale ». 

À noter enfin que le gouvernement défend une piste originale (une prime de 10 000 euros quand une nouvelle habitation sera créée au sein d’un logement pré-existant) et entend étoffer ses aides aux investissements dans des travaux de rénovation, notamment énergétiques, avec un maximum porté à 100 000 euros par logement.